À propos de J’empêche, peur du chat, que mon moineau ne sorte

J’empêche, peur du chat, que mon moineau ne sorte est pour nous un rituel expiatoire : une traversée visant à convoquer nos peurs, à les regarder en face pour défaire un peu de leur emprise.
Notre société entretient un rapport très ambivalent à la peur : censurée (qu’on a peur, on ne le dit pas, non), ce sentiment est instrumentalisé par les médias et par les partis politiques pour congédier l’action et la critique. Elle est pourtant, au contraire, un puissant moteur, un indicateur précieux visant à affuter les perceptions et la pensée pour nous permettre de rester maîtres et maîtresses de nous-même dans les situations où notre équilibre est menacé.
La pièce explore le kaléidoscope des récits dont cette peur peut s’habiller dans le contexte familial, pour cacher la noirceur de son origine. Une noirceur qui n’est pas celle des crimes et des malveillances, mais celle de la béance, des trou-noir : la peur fondamentale de l’inconnu, de l’oubli, de l’informe.
C’est cet inconnu que nous voulons dompter, pour ne plus être sa bête sauvage.
Marceau Deschamps-Ségura & Lucie Durand, co-metteurs en scène
Il était une fois une petite fille nommée Lilou. Non, dit le Docteur ès peur.
J’empêche, peur du chat, que mon moineau ne sorte
Il était une fois une vieille dame nommée Lola. Non plus, dit le Docteur ès peur.
Il était une fois une vieille petite fille nommée Lola à la recherche de sa sœur jumelle nommée Lilou dans les tiroirs de sa mémoire. Mais non, c’est le contraire, dit le Docteur ès peur.
Le père éclata de rire.
La mère essuya quelques larmes.
La salle à manger changea brutalement de couleur.
Violaine Schwartz
GENÈSE DU PROJET
En 2018, Marceau Deschamps-Ségura est collaborateur artistique de Sandrine Anglade pour J!NGLE, commande d’écriture faite à Violaine Schwartz sur le thème du chant. Marceau rencontre alors l’écriture de l’autrice, foisonnante, ludique, profonde : un tremplin pour le plateau.
En parcourant ses textes, Marceau découvre J’empêche, peur du chat, que mon moineau ne sorte, un texte portant sur la peur, le non-dit et la famille. Faisant écho à ses dialogues artistiques avec Lucie Durand, rencontrée l’année précédente dans sa promotion du Théâtre-École des répertoires de la Chanson, il lui propose de mener à bien à ses côtés cette création, au plateau comme à la direction.
La musique, le chant, quand il est guidé par le sens et la dramaturgie : telle est la fibre commune qui réunit ces trois artistes.
Une esthétique de la manipulation s’impose rapidement à elle et lui : Lucie incarnerait tous les membres de la famille de l’héroïne, questionnée par le docteur ès peur ; ils font donc appel à Léna Bokobza-Brunet pour dédoubler les personnages, au moyen d’accessoires symboliques. Egalement chanteuse, elle accompagne l’histoire de ce texte où l’autrice explore la voix, le rythme du dire, la texture de la parole. Par son biais,
Richard Dubelski, partenaire scénique de Lucie et Marceau sur différents spectacles du Hall de la Chanson, rejoint alors l’équipe avec son précieux bagage de comédien et musicien multi instrumentiste.
Léa Moreau collabore avec Marceau Deschamps-Ségura depuis plusieurs projets (Réponses existentielles, Clytemnestre, Alexandre qui) ; le texture matiérée de son travail musical et sonore accompagnera avec évidence cette fouille dans la psychée du personnage central.
https://www.instagram.com/leschantsegares/